Philippe Cachau

Blondel - Mansart de Sagonne : le talent escamoté

Les actes du colloque Jacques François Blondel. La dernière leçon de l’architecture à la française tenu à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine, le 14 décembre 2017, viennent de paraître, aux éditions Mardaga, sous la direction d’Aurélien Davrius, maître de conférences à l’École supérieure d'Architecture Paris-Malaquais.

 

     Actes  du Colloque Jacques-François Blondel 2017, éd. Mardaga, A. Davrius (dir.), 2022

 

Le sommaire est excellent et vous pourrez y découvrir mon article "Blondel et les Mansart : une leçon particulière" (p. 33-53).

Il est l’occasion de rappeler les relations ambivalentes qu’entretînt le grand maître de l’enseignement de l’architecture en France au XVIIIe siècle envers ceux qu’il considérait comme des modèles, à prendre ou à rejeter suivant qu’ils relevaient du génie ou du talent.

Si le goût prononcé de Blondel pour l’œuvre de François Mansart est bien connu, on oublie souvent, cependant, qu’il montra un égal attrait pour l’activité de Jules Hardouin-Mansart, partagé entre l’intellect de l’un et l’affect de l’autre.

S’agissant du troisième membre de la dynastie, à savoir Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne, architecte du roi, Blondel l’ignora superbement, n’évoquant ses bâtiments que de manière laconique.

On découvrira dans cet article comment leurs relations communes avec le grand sculpteur-ornemaniste Nicolas Pineau, mais aussi avec les Voyer d’Argenson à travers l’Académie de Saint-Luc, ou le projet de Trianon allemand que constituait le château de Jägersburg pour le duc Christian IV des Deux-Ponts, furent autant de motifs de frictions ou, tout du moins, de rivalités entre les deux hommes.

Cette relation « particulière » rejaillit naturellement sur Pierre Patte, disciple de Blondel, qui succéda à Mansart de Sagonne au service du prince allemand.

Après Blondel, l’activité de Mansart de Sagonne fut escamotée à son tour par Pierre Patte, notamment dans son grand ouvrage Monuments érigés en France à la gloire de Louis XV (1765) qui recense les grands projets de places royales dédiées au roi. Le dernier Mansart n’apparait pas quoique, suite à mes travaux en thèse, il figure comme l’architecte du roi qui avait le plus investi ce thème, tant à Paris qu’à Marseille*.

Ses grands projets royaux, dont celui de l’église royale Saint-Louis de Versailles, ne seront guère mieux traités par les deux hommes. C’est ainsi que l’architecte du roi demeura un éternel inconnu jusqu’au XXe siècle.

Après tant de vicissitudes, je livre donc aux amateurs d’architecture XVIIIe cet aspect méconnu de l’activité de Blondel et de ses liens avec le dernier des Mansart.

 

                    Jacques-François Blondel, Cours d'Architecture, Paris, 1771-1777                 Jacques-Francois Blondel, portrait anonyme, Paris, Musée Carnavalet

 

____________________________

*Cf. nos articles : "Un projet inédit de place royale et d’hôtel de ville à Marseille par Mansart de Sagonne (1752)", Bulletin Monumental, 1996, n° 1, p. 129-147 ; "Les projets de Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne pour la place Louis XV de Paris (1748-1753)", Paris, capitale des arts sous Louis XV, annales du Centre Ledoux, tome 2, Paris-Bordeaux, 1998, p. 129-147 ; "L'hôtel de ville de Marseille. Vicissitudes de l'aménagement urbain sous Louis XV" in Hôtels de ville. Architecture publique à la Renaissance, ouvrage collectif sous la direction d'Alain Salamagne, Rennes et Tours, 2015, p. 319-344.

Ouvrage Chancellerie d'Orléans 2022. Examen critique

À l'heure où certains s'arrogent des sujets qu'ils ne maîtrisent pas toujours, il est bon de se livrer à un examen critique de leurs travaux.

C'est ce à quoi je me suis livré à propos de l'ouvrage La Chancellerie d'Orléans. Renaissance d'un chef-d'oeuvre XVIIIe-XXIe siècles, paru en février 2022*.

Le quatrième de couverture assure qu'il a été rédigé par "les meilleurs spécialistes". Je démontre ici qu'il n'en est rien ou pas vraiment pour certains d'entre eux.

L'objet de mon propos, au-delà des inexactitudes de circonstances, est de montrer le mode de travail et l'état d'esprit de membres du comité scientifique, retenus on ne sait trop comment parfois**, se livrant à une exploitation éhontée de mes travaux en les citant à minima, voire pas du tout.

On verra comment certains ont priviligié en effet mes travaux sur le chantier du château d'Asnières plutôt que d'évoquer ceux sur l'hôtel de Voyer, objet de l'ouvrage, ou ma publication en 2020 sur Julien-David Le Roy, conseiller artistique du marquis de Voyer. Publication qui n'apparait d'ailleurs pas dans la bibliographie.

Je laisse le soin à chacun de se forger un avis mais l'on constatera, au bout du compte, qu'il n'est pas donné, à qui le veut, de traiter un sujet aussi vaste et complexe sans y laisser quelques plumes ...

Ceux qui me suivent sur ce site, depuis sa création en 2010, savent combien le sujet du marquis de Voyer m'est cher.

Bonne lecture !

Document critique à télécharger :

 Ouvrage Chancellerie d'Orleans, examen critique, Ph. Cachau, mai 2022, pdfOuvrage Chancellerie d'Orléans, examen-critique, Ph. Cachau, mai 2022, pdf

 

    Ouvrage Chancellerie d'Orleans, Paris, 2022, cl. Ph. Cachau

 

     * Éditions Faton.

    ** Les véritables historiens du sujet n'ont pas été, en effet, associés comme le montre la biblioraphie en fin de propos.

Les Gabriels, architectes en Touraine au XVIIe siècle

Célèbre dynastie d’architectes des XVIIe-XVIIIe siècles au même titre que celle des Mansart à laquelle ils étaient apparentées – une nièce de François Mansart, Marie Delisle, sœur de Pierre Delisle-Mansart et cousine germaine de Jules Hardouin-Mansart, avait épousé en 1663 Jacques IV Gabriel (vers 1639-1686) –, une branche des Gabriel va quitter sa Normandie d’origine pour s’établir au début du XVIIe siècle en Touraine avant de faire carrière à Paris et Versailles pour une partie d’entre eux.

Dans les années 1630, Jacques II Gabriel (1605-1662) quitta en effet Argentan (Orne), où demeura son frère aîné Maurice (1602-1649), afin de s’établir dans la riche contrée de Saint-Paterne, sise entre Tours et Le Mans, sur la route reliant les deux villes et où se trouvait l’importante abbaye de la Clarté-Dieu.

Ces terres fécondes devaient constituer, dans les années 1660, celles offertes par Louis XIV à sa maîtresse tourangelle Louise de La Vallière (née à Tours en 1644, ndlr) pour constituer le duché de La Vallière.

Ceci explique en partie pourquoi la descendance de Jacques II s’en alla œuvrer à Paris et Versailles après son décès en 1662 pendant que l’autre partie demeura en Touraine à Saint-Paterne où sont encore une partie de la famille.

 

          Jacques II Gabriel, grande terrasse du château de la Roche-Racan, Saint-Paterne, années 1630, cl. Ph. Cachau              Jacques II Gabriel, château de la Roche-Racan, Saint-Paterne, années 1630, cl. Ph. Cachau

 

La première et la seule réalisation attestée de Jacques II, en l’état actuel des connaissances, est le château de la Roche-Racan à Saint-Paterne, bâti au début des années 1630 pour Honorat de Bueil (1589-1670), seigneur de Racan, poète réputé du règne de Louis XIII, devenu l’un des premiers membres de l’Académie française créée par Richelieu en 1634-1635. Rappelons que ce dernier établira aussi en Touraine son château et une cité à proximité, au sud de la région où était aussi d’autres grands seigneurs parisiens (Le Bouthillier, Mexme Gallet …) ou poitevins (De La Trémoille).

Jacques II Gabriel se livra à La Roche-Racan a un intéressant jeu de terrasse dominant la vallée de l’Écotais et conçut un grand corps de logis perpendiculaire à la grande terrasse. Là, est encore visible, dans ce qui reste du logis, le bel escalier à rampe sur rampe, agrémenté de pilastres ioniques et à la belle stéréotomie, l'art de lier les pierres entre elles. Les proportions de l'ensemble sont un peu maladroites mais il dut faire sensation en son temps dans cette partie de la Touraine.

 

                                                        Jacques II Gabriel, grand escalier du  chateau  de la Roche-Racan, années 1630, cl. Ph. Cachaue

 

On peut aussi rendre à Jacques II, voire à ses fils Jacques IV et Pierre, ce dernier très actif dans le secteur, les superbes retables baroques de l’église de Saint-Paterne.

Les trois hommes ne manquèrent sans doute pas d’être aussi sollicités pour les retables et autres décorations baroques des environs, à l’abbaye de La Clarté-Dieu ou à la collégiale SS. Michel-et-Pierre de Bueil, entre autres.

 

           Les Gabriels, retables de l'église de Saint-Paterne, milieu XVIIe, cl. Ph. Cachau              Pierre Gabriel, décor de la chapelle du château de la Motte-Sonzay, vers 1685, cl. Ph. Cachau

 

Nos recherches sur le château de La Motte à Sonzay ont permis d’identifier l’activité de Pierre Gabriel (1649-1695) ‒ 3e fils de Jacques II, issu d’un second lit ‒ pour Marie-Anne de Bueil, épouse du comte Jean-Léonard d’Acigné et future mère du maréchal-duc de Richelieu.

En décembre 1685, Pierre Gabriel se vit commander le nouveau maître-autel de l’église de Sonzay, ensemble détruit à la Révolution. Il ne fait pas de doute qu’il est aussi l’auteur de la décoration baroque de la chapelle du château de La Motte, exécutée à la même période. La Motte était en effet depuis le Moyen Age un fief de la famille de Bueil et Jacques II, père de Pierre, avait réalisé celle de La Roche-Racan en 1635-1636. Ajoutons que l’activité de Pierre Gabriel à La Motte-Sonzay est attestée dès 1679.

Le frère aîné de Pierre, Jacques IV Gabriel quittera la Touraine pour Paris et Versailles en 1662-1663, donnant naissance à la branche des grands architectes du règne de Louis XV : Jacques V Gabriel (1666-1742), son fils, et Ange-Jacques Gabriel (1698-1782), son petit-fils.

 

     Jacques V Gabriel, Pavillon central de la place de la Bourse, Bordeaux, 2e quart du XVIIIe siècle, cl. Ph. Cachau          Ange-Jacques Gabriel, Colonnade du pavillon du Garde-Meuble, 1766, cl. Ph. Cachau

 

Les Gabriel, architectes en Touraine au XVIIe siècle, émission Tilt, TV Tours, 22 février 2022, vidéo

Bibliographie :

Michel Gallet - Yves Bottineau (dir.), Les Gabriel, éd. Picard, Paris, 1982, réédition 2004.

Jean-Marie Pérouse de Montclos, Ange-Jacques Gabriel, l'héritier d'une dynastie d'architectes, CMN, Paris, 2012.

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Le relief de l'Adoration de la Vierge de la chapelle royale d'Amboise identifié

On ignorait jusqu'à l'an dernier l'auteur exact du relief XIXe figurant Charles VIII et Anne de Bretagne en adoration devant la Vierge à l'enfant sur le portail de la chapelle royale du château d'Amboise. Relief qui vînt remplacer la rosace réalisée sous Louis-Philippe.

Attribué à Adolphe-Victor Geoffroy-Dechaume (1816-1892) par Jean-Pierre Babelon dans son ouvrage sur le château publié en 1990, nous l'avons rendu en 2020 au sculpteur Eugène Legrain (1837-1915) qui l'exécuta en 1879-1880. Si ce sculpteur n'évoque plus rien aujourd'hui, il était au contraire très en vue à Paris au moment de la réalisation du relief, s'étant vu confié la réalisation de la fontaine du Palais du Trocadéro pour l'exposition universelle de 1878 dont Rodin, alors au début de sa carrière, exécuta les mascarons (portés à la cascade du parc de Sceaux en 1937).

Cette attribution, rendue possible par la correspondance de Victor Ruprich-Robert au comte de Paris, conservée aux Archives nationales, vient lever une énigme sur l'auteur véritable de ce relief que l'on croit souvent daté de l'époque gothique.

Relief totalement anachronique en vérité au regard de celui au-dessous, de style renaissant et contemporain du château de Charles VIII à son retour d'Italie en 1495 figurant Le miracle de Saint-Hubert.

Quand le XIXe siècle néo-gothique trompe son monde ... !

https://collections.musee-rodin.fr/fr/museum/rodin/mascarons-pour-la-fontaine-du-trocadero

Article Nouvelle République Amboise du 9 octobre 2021

 

                                           Eugène Legrain, Charles VIII et Anne de Bretagne en adoration devant la Vierge à l'Enfant, 1879-1880. Réattribution par Ph. Cachau en 2021, cl. Ph. Cachau                                                       

                                                                             

Alexis de Tocqueville : de Versailles à la Touraine

On ne présente plus Alexis de Tocqueville (1805-1859), de son vrai nom Alexis-Henri-Charles Clérel, comte de Tocqueville, chantre de la démocratie américaine. Le début de sa carrière fut marquée par sa nomination, en 1827 en tant que juge auditeur au Tribunal royal de Versailles. Son père était alors préfet de Seine-et-Oise.

Cette nomination lui valut de faire la connaissance de Gustave Bonnin de La Bonninière de Beaumont, dit Gustave de Beaumont (1802-1866), désigné l'année précente (22 février 1826), procureur du roi au tribunal de première instance. Beaumont restera à Versailles jusqu'à sa nomination à celui de Paris, le 27 septembre 1829.

Les deux hommes, qui étaient de la même génération et pétris des mêmes idées, se lièrent d'une amitié indéfectible dans la cité royale. Beaumont hébergea ainsi son ami au 66 rue d'Anjou où il disposait d'un appartement. Une plaque commémorative rappelle la présence de Tocqueville à cet endroit, de 1828 à 1832*. Il nous est sensible à plusieurs titres : non seulement en tant qu'enfant du quartier Saint-Louis de Versailles, mais aussi en tant qu'ex-voisin du lieu durant deux décennies et enfin en tant qu'auteur d'un ouvrage sur la famille de Beaumont et son fief tourangeau en 2019**.

                    Logement de Tocqueville à Versailles, 66 rue d'Anjou, cl. Ph. Cachau                    Plaque du 66 rue d'Anjou à Versailles, cl. Ph. Cachau

En 1830, suite à leur démarche auprès du garde des Sceaux, Tocqueville et Beaumont obtinrent du gouvernement un congé de dix-huit mois afin de se rendre aux Etats-Unis pour étudier le système pénitentiaire américain, aux conceptions révolutionnaires alors en termes de gestion des détenus. En avril 1831, les deux hommes embarquèrent au Havre en direction de New York. Ce séjour, qui s'étendit jusqu'en janvier 1832, valut aux deux amis la sortie d'ouvrages majeurs pour le XIXe siècle, à savoir : pour Gustave de Beaumont, Du système pénitentiaire aux Etats-Unis (1833) en collaboration avec Tocqueville et Marie ou de l'esclavage aux Etats-Unis (1835), première grande dénonciation de la situation des Noirs américains. Enfin, pour Tocqueville, l'ouvrage en deux tomes, De la démocratie en Amérique (t. I, 1835 ; t.II, 1840), "best-seller" de la littérature française et européenne. Les deux hommes se livreront ensuite à une carrière politique sur les bancs de l'Assemblée en tant que députés.

                    Les Trésorières à Saint-Cyr-sur-Loire, XVIIIe-XIXe siècles, cl. Ph. Cachau                           Théodore Chasseriau, Alexis de Tocqueville (1805-1859), 1850, Château de Versailles

En 1853, Tocqueville éprouvant le besoin de passer l’été et l’hiver en province - le Second Empire n'était pas sa tasse de thé ! -, son ami Gustave de Beaumont lui trouva une demeure, Les Trésorières à Saint-Cyr-sur-Loire, en périphérie de Tours. Il y séjourna de juin 1853 à mai 1854. Ceci lui permit d'entreprendre des recherches aux Archives départementales d’Indre-et-Loire pour servir son essai, L'Ancien Régime et la Révolution (Paris,1856). Tocqueville décédera cinq ans plus tard à Cannes.

                         Gustave de Beaumont (1802-1866)                                Ouvrage Beaumont-la-Ronce 2019

Cette présence d'Alexis de Tocqueville à Saint-Cyr-sur-Loire, dans la région de la famille de Beaumont, lui vaut aujourd'hui son portrait sur un rond point très fréquenté de la ville. On regrettera que Gustave de Beaumont, issu d'une des plus vieilles familles tourangelles et ce depuis le Moyen Age, né à quelques kilomètres de là, à Beaumont-la-Ronce, n'ait pu disposé de semblable faveur près de lui, son oeuvre littéraire - certes quelque peu oublié aujourd'hui - ayant été au moins aussi important. Espérons que ce regrettable oubli saura être réparé par la municipalité.

* 1831 nous semble plus exact, Tocqueville étant en Amérique en 1831-1832 et à Paris ensuite.

**Ouvrage disponible sur demande (12 euros + frais de port).

Emmerveillez-vous au Garde-Meuble de la Couronne !

Si vous êtes férus du XVIIIe siècle, vous serez comblés !

Courrez vous replonger dans cette époque d'un raffinement extrême en visitant les splendides appartements privés des directeurs du Garde-Meuble de la Couronne, devenu hôtel de la Marine à la fin du XVIIIe siècle.

Au-delà du Siècle des Lumières, vous vous laisserez séduire par le luxe inouï des grandes salles XIXe sur la place de la Concorde, ainsi que par celui du café-restaurant La Pérouse dans la grande cour, nouveau lieu tendance de la capitale.

Vous aurez un avant-goût de ce qui vous attend en vous plongeant dans notre album photos.

N'hésitez pas à cliquer sur les images pour les agrandir comme toutes celles de ce blog.

Bonne visite !

 

       Galeries en enfilade sur la grande cour vers le grand escalier, cl. Ph. Cachau

Frissonnez au château de Jossigny (Seine-et-Marne)

Donnez-vous des frissons au château de Jossigny, charmant château du XVIIIe siècle de style rocaille que nous avons rendu à Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne dans les années 2000 et 2010*.

Il est toujours heureux de voir ses travaux scientifiques exploités à destination du public et à des fins ludiques. C'est ce qu'a réalisé la jeune équipe de DeathScape Story Games, réunie par Pierre Wagner et Pascal Barbe, jeune équipe talentueuse, à l'imagination débordante. Vous pourrez en juger à travers la présentation en lien ci-dessous.

L'ouverture de ce jeu à sensations au sein du château s'est déroulée avec grand succès, les 3 et 4 juillet derniers.

Le jeu se tient tous les week-ends de l'année jusqu'à la saison 2022 (au moins).

Félicitations aux Centre des Monuments nationaux, à la Conservation de Champs-sur-Marne et à l'équipe de DeathScape Story Games pour ce projet novateur d'animation du patrimoine.

https://www.chateausanglant-escapegame.fr

https://www.crazyradio.fr/2021/07/marne-et-gondoire-frissonnez-au-chateau-sanglant-de-jossigny

 

    Château de Jossigny, côté jardin, 1753, cl. Ph. Cachau

*Rendu dans notre thèse soutenie en 2004 et dans les articles publiés en 2011 et 2012 dans les Cahiers de l'histoire de l'art (voir Articles).

Pierre Meusnier, un grand architecte tourangeau du XVIIIe siècle à (re)découvrir.

Qui se souvient de Pierre Meusnier (1711-1781) à Tours et en Touraine ? À part de rares historiens, plus personne n'a conservé le souvenir de ce grand architecte tourangeau du XVIIIe siècle. Pourtant, et fort heureusement, nombre de ses bâtiments sont parvenus jusqu'à nous. Ils ont survécu aux affres de l'Histoire et particulièrement aux nombreuses démolitions de la Seconde Guerre mondiale et de l'Après-Guerre.

Le Palais du Commerce, dit "Hôtel des Consuls" au XVIIIe siècle, rue Jules Favre, demeure l'une de des plus belles réalisations de l'architecte à Tours, celle d'un style rocaille qu'il répandit dans la Touraine du siècle des Lumières. Actuelle propriété du Conseil départemental d'Indre-et-Loire* et Chambre de Commerce de Tours jusqu'en 2018, le bâtiment fut érigé de 1757 à 1759.

Nous nous étions penchés sur son histoire dans les années 1990 lors de nos recherches en thèse sur Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne auquel l'édifice fut souvent attribué. Cette attribution n'était pas totalement infondée, tant les similitudes, biographiques comme esthétiques, sont nombreuses entre les deux architectes comme on le découvrira dans notre article pour la Société Archéologique de Touraine. La vérité sur l'auteur de l'édifice fut établie par nos soins, découverte non à Tours mais aux Archives nationales, telle que portée dans notre thèse soutenue en 2004.

Cet article est aussi l'occasion de dresser un bref panorama de l'activité de Pierre Meusnier à Tours et en Touraine. Nous lui avions rendu en 2013 les ailes et les pavillons latéraux du château des Ormes, édifiés par le comte Marc-Pierre de Voyer d'Argenson, ministre de la Guerre de Louis XV, lors de son exil sur ses terres de 1757 à 1764.

D'autres bâtiments demeurent à réattribuer. C'est tout l'objectif que nous nous assignons dans le cadre de la redécouverte des réalisations post-Renaissance de la Touraine.

*Seule la partie fin XIXe en retour sur la rue Berthelot appartenait à la Chambre de Commerce, vendue en 2018.

Société archéologique de Touraine SAT 37

 

                      Bulletin de la Société archéologique de Touraine, t. LXVI, 2020 ( 2021)             Pierre Meusnier, Palais du Commerce de Tours, 1757-1759, cl. Ph Cachau

 

Les patrimoines post-Renaissance de Touraine sont sur Facebook !

La Touraine est l’une des provinces de France la plus riche en patrimoine. Plusieurs centaines de sites sont protégés, inscrits ou classés, pour ce seul département, soit presqu’autant que certaines régions françaises !

Ce patrimoine est trop souvent réduit à celui de la seule Renaissance et particulièrement aux grands châteaux du Val-de-Loire classés Unesco.

 

                                                    Pierre Meusnier, Chartreuse du Liget, milieu XVIIIe, cl. Ph. Cachau

 

Découvrez à travers la page Facebook Patrimoines de Touraine la diversité de ce magnifique patrimoine, du XVIIe au XXe siècle, souvent ignorés.

Cette page entend contribuer à une plus large connaissance du patrimoine de Touraine au-delà de la seule Renaissance, à sa protection et à son étude. Elle entend participer aussi à une plus large diffusion du tourisme sur l'ensemble du département d'Indre-et-Loire dans ses parties nord et sud qui demeurent éloignées des grands flux du Val-de-Loire. Une répartition plus équitable du tourisme accroîtra ainsi les potentialités de ces territoires.                                                                                             

Sont présentés actuellement parmi les plus beaux et les plus intéressants sites des XVIIe-XVIIIe siècles, qu’il s’agisse d’émouvants vestiges ou de bâtiments demeurés jusqu’à nous. Ceux qui souhaitent séjourner plus longuement trouverons, non loin de là, des lieux d’hébergement des plus séduisants.

Bonne découverte à tous !

 

                  Guillaume de La Tremblaye, abbaye mauriste de Bourgueil, XVIIIe siècle, cl. Ph. Cachau             Château de Restigné, XVIIIe siècle, cl. Ph. Cachau

Restauration de la cathédrale Saint-Louis de Versailles 2021-2022

La cathédrale Saint-Louis de Versailles est l’un des édifices religieux majeurs du règne de Louis XV au même titre que les églises Saint-Sulpice ou Sainte-Geneviève (actuel Panthéon) à Paris1.

 

                                             La cathédrale Saint-Louis depuis le Potager du Roi, cl. Ph. Cachau

 

Depuis le mois de mars 2021, la cathédrale fait l’objet d’une grande campagne de restauration extérieure. Cela faisait une vingtaine d’années que l’on n’était plus intervenu aussi massivement sur l’édifice : les dernières restaurations en la matière datent en effet du début des années 2000. Elles faisaient suite alors aux dégâts causées par la tempête de décembre 1999.

La présente campagne a pour objet :

1°) le ravalement de la façade principale et des deux tours latérales.

2°) la restauration des trois portes de la façade.

3°) la réfection du vitrail central en façade avec remplacement des fers dégradés de l'armature, des verres abimés et une consolidation des plombs.

4°) la révision générale de la couverture des tours latérales (ardoises, plomb et étanchéité au droit des corniches).

5°) la mise en place d’un dispositif destiné à protéger durablement la pierre des déjections des volatiles2.

On regrettera dans ce beau programme, l’absence de la mise en dorure des plombs extérieurs (bulbes des tours latérales, flèche du dôme3 et couverture de la chapelle axiale de la Vierge), lesquels pourront faire l’objet d’une prochaine campagne d’intervention. Ainsi réhabilités, ils feraient un bel écho aux plombs dorés de la chapelle royale récemment dégagée.

 

           Plombs des tours latérales autrefois dorés, cl. Ph. Cachau          La chapelle royale de Versailles en 2021, cl. Ph. Cachau

 

On ne peut qu’encourager une telle initiative afin de redonner à la cathédrale de Versailles et, plus largement aux églises de la cité royale, leur splendeur initiale. Ceci contribuerait à leur réhabilitation dans l’esprit des visiteurs de la ville et chez les historiens et historiens d’art. Rappelons que Versailles était alors la capitale administrative de la France, pays le plus peuplé et le plus puissant d’Europe. L’église Notre-Dame, église primitive de la cité nouvelle de Louis XIV, avait aussi ses plombs dorés comme nous l’avons rappelé en 2009, d’après un dessin retrouvé aux Archives nationales4.

 

              Plombs dorés des tours latérales de Notre-Dame de Versailles,  détail,  Jules Hardouin-Mansart (agence),1684, Archives nationales                    Plombs autrefois dorés de la flèche et de la chapelle de la Vierge, cl. Ph. Cachau

 

Les armes de France du blason royal ailé sur le fronton principal pourront aussi être rétablies durant cette campagne à l’instar d’autres édifices de la ville (église Notre-Dame, Bibliothèque municipale, ex-ministère des Affaires étrangères), blason ainsi visible sur la place Vendôme à Paris.

 

           Jules Hardouin-Mansart, fronton de la place Vendôme, blason ailé à fleurs de lys, détail, cl. Ph. Cachau           Notre-Dame de Versailles, tours et fronton aux armes royales, cl. Ph. Cachau

 

                                 Fronton principal de Saint-Louis de Versailles, blason royal ailé avec lys de France disparus, cl. Ph. Cachau

 

1.Voir notre ouvrage publié en 2009 aux éditions Somogy. Ce bel édifice ne suscite, curieusement, pas autant d’intérêt médiatique que le Potager du roi voisin. Il contient pourtant parmi les chefs-d’œuvre de la peinture des XVIIIe et XIXe siècles et abrite l’une des plus belles charpentes de France.

2.Précisions aimablement communiquées par la Conservation régionale des Monuments historiques Ile-de-France.

3.La dorure de la flèche fut timidement engagée au début des années 2000. Rappelons que, sous l’Ancien Régime, il n’était pas concevable de laisser ainsi le plomb d’un édifice royal, surtout lorsqu'il est aussi visible depuis la terrasse de l’Orangerie du château. La remise en dorure des bulbes redonnerait au lieu le prestige qui lui fait actuellement défaut.

4.Réflexions engagées suite à nos échanges avec Gérald Van Der Kemp en 1991.

Deux portraits de Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne, dernier des Mansart, à identifier

Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne (1711-1778) fut le dernier des trois grands Mansart. Sa notoriété d'architecte du roi Louis XV et sa fortune lui valurent de se faire portraiturer par deux des plus grands pastellistes français du XVIIIe siècle : Maurice-Quentin de La Tour (1704-1788) et Louis Vigée (1715-1767), père de la célèbre Elisabeth Vigée-Lebrun (1755-1842).

Le premier portrait par La Tour figure sur le livret du Salon du Louvre en 1738 (p. 17, n° 70). Ce portrait n'est curieusement pas signalé dans les catalogues de l’œuvre de l’artiste par Xavier Salmon en 2001 et 20041. Il apparait en revanche dans le Dictionnary of pastellists before 1800 par Neil Jeffares en 20062. Il n’y a pas d’autre "Mansard, architecte du roy" à cette époque que lui. Ce portrait correspond à son entrée au service du comte de Clermont, prince du sang, abbé commendataire de Saint-Germain-des-Prés en 1737.

 

  Livret Salon de 1738, p 17.

 

Celui de Vigée fut présenté au salon de l’Académie de Saint-Luc − académie protégée par le marquis Marc-René de Voyer d'Argenson, son ami et mécène − en 1751 (n° 118 du livret)2. Ce portrait correspond à sa pleine activité pour le marquis à ses château et haras d'Asnières-sur-Seine.

Peut-être perdus (?), ces portraits méritent toutefois d'éveiller la curiosité des amateurs de peinture XVIIIe. Cet appel s'adresse particulièrement aux conservateurs de musée, aux historiens de l'art de la période, aux collectionneurs, marchands d'art et autres détenteurs de pastels des deux artistes dont ils ignorent l'identité jusqu'à présent.

La physionomie de l'architecte peut être rapprochée de celle de son père, Jacques Hardouin-Mansart, comte de Sagonne (1677-1762), portraituré vers 1701 à l'occasion de son mariage avec Madeleine Bernard, fille de Samuel Bernard, banquier de la cour, par Hyacinthe Rigaud.

 

           Hyacinthe Rigaud (atelier ?) : Jacques Hardouin-Mansart, vers 1701, coll. privée, cl. Ph. Cachau)

 

Elle peut être aussi rapprochée de celle de son aïeul, Jules Hardouin-Mansart (1646-1708), à ses débuts.

 

           Hyacinthe Rigaud, Jules Hardouin-Mansart, 1685, Louvre

 

En vous remerciant de votre collaboration.

Contact

 

1.https://neiljeffares.wordpress.com/2018/07/12/the-louvre-pastels-catalogue-errata-and-observations

2.Références Neil Jeffaresreferences-neil-jeffares.pdf

3.Archives de l'Art Français, t. IX, 1915, p. 477.